La force de l’imagination (2/2)

Émile Coué au service de nos réussites

Vouloir ? Ou pouvoir ?

Émile Coué était parti en guerre contre ce vieil adage qui a la peau dure et selon lequel « quand on veut, on peut ».

Que n’a-t-on entendu cet axiome avec au fond de soi de l’agacement ou de l’énervement. Comme si la volonté seule pouvait tout faire ! C’est une vision étroite et ramassée sur elle-même, qui ne suffit pas à déterminer un changement, avec parfois de la culpabilité. « Quoi ? Tu n’as pas de volonté ? ».

Eh bien non, ce n’est pas aussi simple. Si ça l’était, toutes nos difficultés ou presque fondraient comme un morceau de sucre dans un café bien chaud.

Or, « vouloir » et « pouvoir » ne vont pas de pair !

Plus encore, quand on pense « je veux », on pense bien souvent et en même temps « je ne peux pas ». D’où les nombreux échecs de celles et ceux qui veulent, par exemple, arrêter de fumer ou bien perdre des kilos pour maigrir. Leur imagination les conduit sur la non possibilité. Et hop ! le cercle des croyances se remet en route ! Même si ce n’est pas conscient, il n’en demeure pas moins que l’imagination prédomine sur ce que la volonté désire…

Partant de là, Émile Coué pose un autre postulat selon lequel « l’imagination peut être conduite ».

Pour cela, il utilise l’autosuggestion qui s’apparente à une sorte d’auto-hypnose. En se répétant, à voix haute, une vingtaine de fois, notre objectif, nous ne faisons que parler consciemment à notre inconscient. Nous modifions ainsi notre perception de ce qui peut arriver et nous remettons en accord imagination et volonté.

Nous connaissons tous sa phrase : « Tous les jours et à tous points de vue, je vais de mieux en mieux » Dommage qu’elle ait été tellement brocardée et moquée car elle contient une sacrée vérité. C’est au demeurant exactement ce que font les psychothérapeutes et les coachs pour accompagner leurs clients. Quelques inductions pour les amener en douceur là où veulent aller.

Pourquoi cette phrase a-t-elle été moquée ? Parce que l’on a voulu en faire une phrase magique sans aucun aménagement. Qu’est-ce que ce serait bien – et pratique – un truc qui marche tout le temps sans avoir d’effort à faire ! Eh bien non ; l’être humain est trop complexe pour cela. Il n’est pas une machine, il est un composé de croyances et d’émotions. Mais cela ne signifie nullement qu’Emile Coué avait tort dans son approche.

Je peux ou je ne peux pas ?

Imaginons que vous ayez collé dans tout votre appartement des post-it sur lesquels vous avez inscrits : « Ma vie est merveilleuse ». Vous en avez même collé sur le tableau de bord de votre voiture et sur votre radio-réveil. A chaque instant de la journée, vous pouvez lire que votre vie est merveilleuse. Et pour couronner le tout, vous vous le récitez une dizaine de fois chaque matin en vous levant.

Et cependant, vous vous sentez d’humeur maussade, triste, angoissé, vous vous sentez apathique, mal dans votre peau. Tout simplement par ce que vous ne vous êtes pas approprié ce message, vous ne le vivez pas. Vous l’avez accepté au niveau cognitif mais votre corps, votre système émotionnel ne le prend pas en compte et rien ne change.

Il se peut tout simplement que vous ayez conservé au fond de vous une croyance plus forte qui serait : « Je ne suis pas heureux ».

Et donc, si vous ne vivez pas le message du post-it, c’est parce que vous continuez de vivre – en conscience ou pas – une autre croyance située à son opposée. Si vous vivez que vous n’êtes pas heureux, il vous est difficile de considérer que votre vie est merveilleuse. En effet, vous continuez de fonctionner avec la pensée que vous n’allez pas être heureux ou que vous avez tous les risques d’être malheureux.

Ici, l’autosuggestion ne peut pas fonctionner car il y a désaccord entre imagination et volonté. Si vous déclarez consciemment « je veux » mais que dans le même temps, votre inconscient déclare « je ne veux pas », que croyez-vous qu’il va se passer ?

S’auto-suggérer pour réussir

Émile Coué nous avait prévenu : « quand il y a lutte entre l’imagination et la volonté, c’est toujours l’imagination qui l’emporte sans aucune exception »

C’est pourquoi il importe de savoir que « l’imagination peut être conduite » et donner alors les résultats espérés.

Critiquer l’auto-suggestion, c’est oublier que certaines expériences ont montré à quel point des substances dénuées de réelles propriétés curatives peuvent entraîner la guérison totale d’une pathologie si l’on y croit. Il s’agit en effet d’une mesure thérapeutique qui n’a, intrinsèquement, aucune efficacité ou quasiment pas mais, si la personne est convaincue de recevoir un traitement approprié, la mesure agira. C’est la force des prédictions positives, le fameux effet placebo : encore une fois, ce que je crois crée ma réalité. On envoie une information spécifique à l’inconscient et il le traite à sa manière.

Bien que l’on en parle moins, il existe également son opposé, l’effet nocebo : la prédiction négative. On se persuade, en dehors de tout rapport avec le concret, qu’un évènement néfaste va intervenir. La puissance de cette crainte imaginaire est telle qu’il peut arriver que l’on aille directement vers cet évènement – et même qu’on le provoque – afin de mettre un terme à la peur que l’on éprouve (et de donner raison à notre pensée).

Les traitements sous hypnose ont bien comme effet de modifier notre croyance sur un point précis de manière à créer pour nous une réalité différente et nous convenant.

Dans le même genre, nous retrouvons l’effet Pygmalion (parfois appelé effet Rosenthal ou prophétie auto-réalisante) : un enseignant réellement convaincu de la qualité d’un élève y place une confiance qui, non seulement lui permet de mieux apprécier le travail de ce dernier, mais en outre permet d’accroître les résultats en qualité. Tout éducateur ou parent qui dispose de cette croyance en fait bénéficier l’enfant. La même expérience en sens inverse a été également réalisée : à un groupe d’élèves doués, on avait préalablement exposé à leur professeur qu’ils étaient singulièrement limités et de fait, les élèves régressèrent.

C’est dire combien nous fonctionnons dans un système de croyances auto-validantes. Ce point a toute son importance quand nous sommes parent, éducateur, manager, accompagnant, etc. Notre croyance dans les qualités d’une personne favorise l’éclosion de qualités. Notre croyance dans ses défauts et insuffisances accroit celles-ci.

L’autosuggestion positive nous permet de transposer vers nous-mêmes ou vers une autre personne ce positif.

En fait, par l’autosuggestion, nous développons la capacité imaginative et, en la couplant harmonieusement avec la volonté, nous maximisons les chances de réussite.

Un protocole simple et efficace

Toutes ces expériences ont validé a posteriori ce qu’Émile Coué avait démontré : la force de l’imagination.

C’est pourquoi il estimait important de pouvoir la conduire. Sa phrase célèbre n’est donc nullement dénuée de sens. D’autant plus qu’il a préconisé de bâtir nos propres autosuggestions en fonction de ce que nous voulons à condition d’utiliser un protocole simple et bien déterminé.

D’abord, utiliser le « je ». C’est de moi dont il s’agit et en utilisant le « je », je me mets en action. Moi et non pas quelque chose d’indéfini et impersonnel.

Ensuite, utiliser le présent ou le futur immédiat. Ainsi, je renforce ma mise en action au lieu de demeurer dans un hypothétique et lointain avenir qui deviendrait conditionnel.

Par ailleurs, la formulation doit être positive. On sait aujourd’hui que le cerveau ne saisit pas la négation. Pour simplifier, « je ne veux pas de ceci » est traduit par notre cerveau en 2 étapes : « 1. Penser ‘je veux ceci’ » puis « 2. Effacer la pensée ‘je veux ceci’ » pour exprimer la négation, donc 2 fois plus de neurones activés à propos de quelque chose qu’on ne veut pas !

Et puis, quant à être précis, il faut dater et affiner l’objectif à atteindre : répondre à où, quand et comment est indispensable.

C’est ainsi que « je veux un jour faire ceci » va se traduire par « je vais faire ceci tel jour». La dynamique n’est plus la même !

Une précaution toutefois ! Il est évident que toutes ces demandes se doivent d’être concrètement réalisables et dépendre de moi. Si je veux quelque chose qui est par exemple techniquement ou physiquement impossible à réaliser ou bien qui dépend de quelque chose (ou de quelqu’un) qui m’est totalement extérieur et sur lequel je n’ai aucune prise, alors aucune technique ni aucune méthode ne pourra me permettre d’accéder à mon objectif. C’est pour avoir omis ce point que la fameuse phrase d’Émile Coué a souvent été ridiculisée.

Mais pour les multiples objectifs qui émaillent nos vies, cette méthode est d’une très grande efficacité et a prouvé plus d’une fois sa pertinence.

 

En résumé, le Cercle des Croyances détermine le processus et la méthode d’Émile Coué définit les modalités pour rendre ce processus opérant. Quel dommage que ce pharmacien humaniste ait été par la suite ainsi maltraité. Car sa méthode, pour peu que l’on se décide à l’appliquer, rend d’inestimables services. Et lorsque l’on en a fait son propre mode de fonctionnement, ce sont alors de multiples portes qui s’ouvrent à nous !

Xavier Cornette de Saint Cyr

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